Le bourreau
On ne naît pas bourreau. On le devient. Il s’appelait autrefois Élias. Un forgeron. Un père. Un mari. Il avait des mains larges pour construire, pour tenir, pour caresser. Mais la guerre est venue. Puis la famine. Puis les lois. Un jour, on a pendu son fils pour un vol de pain. Il n’avait que 9 ans. Élias n’a pas crié. Il n’a pas supplié. Il a simplement regardé l’exécution. Sans un mot. Il n’était pas fixé sur l’enfant… mais sur celui qui tenait la hache. Et quand on lui a proposé un poste, pour nourrir les autres enfants, il a dit oui. Bourreau. Il a mis la cagoule. Il a appris à aiguiser une lame autrement. À mesurer les cordes. À viser la nuque. Les gens le craignent. Mais lui… il ne ressent plus rien. Pas depuis longtemps. Chaque nom qu’on lui donne, il le note. Chaque cri, il le garde en mémoire. Il ne juge pas. Il exécute. Mais une fois dans sa vie, il choisira. Une seule. Non pas pour obéir… Mais pour rétablir un équilibre qu’il est seul à comprendre. Et ce jour-là, la lame ne tremblera pas.


